Lobby informatique et Ministère de l’Education Nationale

lundi 11 août 2008


"Alors que les travaux des commissions Attali (sur la libération de la croissance) et Pochard (sur la rénovation du métier d’enseignant) ont été largement médiatisés par le gouvernement, la commission Mounet, dite E-educ, à été mise en place dans un cadre beaucoup plus confidentiel et sans aucune couverture de la part des grands médias.

Avant même d’analyser prochainement son rapport de synthèse qui vient juste de tomber « Pour le développement du numérique à l’école » ... en 90 pages, nous devons nous interroger sur sa composition. Sa composition est pourtant proprement scandaleuse car elle se présente comme une entreprise de lobbying des milieux informatiques organisée sous l’autorité du ministre Xavier Darcos. Son objectif est fondamental pour les missions de l’Education Nationale dans le cadre de leur moderni-sation relativement à l’emploi et à l’implication des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE).

Jean Mounet, maître à penser du Ministère et du MEDEF ?

Jean Mounet est Président de Syntec Informatique, la chambre syndicale qui regroupe les Sociétés de Services et d’Ingénieries Informatiques (SSII) et les Editeurs de Logiciels.
Créée en 1970, cette structure compte aujourd’hui 650 entreprises adhérentes, représentant 33 milliards d’Euros pour des activités cumulées occupant 337 000 salariés. _ Syntec informatique, c’est donc un peu l’IUMM des services informatiques.
On ne croit pas si bien dire quand on sait que Jean Mounet a été récemment missionné comme Président d’un groupe de travail du MEDEF pour la rédaction d’un rapport intitulé « Faire de la France un leader mondial de l’économie numérique », document publié en Janvier 2008, et prestement transmis au gouvernement.
Rapport dans lequel le MEDEF donne nombre de conseils au gouvernement, notamment en matière d’éducation.
Le même Jean Mounet est également Vice-Président de SOPRA GROUP (groupe de conseil et de services dans le domaine des technologies de l’information) qui compte au niveau mondial 11000 employés pour un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros ( 1001,4 millions d’euros exactement) . SOPRA GROUP développe ses activités en France, au Benelux, en Espagne, au Royaume-Uni, en Suisse, en Italie, et par sa filiale Axway (qui intervient aussi en Europe) en Asie et aux Etats-Unis, dont Jean Mounet est président de ces deux dernières branches .
Jean Mounet est enfin Président de Pasc@line, émanation de Syntech Informatique, une association (loi 1901) qui regroupe 40 écoles d’ingénieurs.
C’est pourtant lui que le gouvernement a désigné comme son maître à penser : Jean Mounet, organisateur de boîte à idées du MEDEF, est aussi celui de l’Education Nationale.

Une commission aux mains des intérêts privés organisés

Alors que la commission de 23 memebres ne compte que 4 représentants de l’Education Nationale, les 19 autres memebres représentent, eux, directement le lobby informatique .
Le « système Mounet-MEDEF » représente 17 memebres, soit 74% de la commission et les sociétés informatiques privées représentent en tout 83% de la commission : IBM, Capgemini, Microsoft, Accenture, HP, Sopra Group (encore !), Syntec informatique, Pasc@line, E-Gov Solutions et Strat-up, certaines de ces sociétés étant représentées par plusieurs membres. Sociétés informatiques pour lesquelles l’Education Nationale constitue un marché juteux et qui sont particulièrement bien organisés pour en faire tomber des pans entiers dans leur escarcelle, et ce avec la bénédiction deu Ministre lui-même .

On soulignera aussi l’absence de tout représentant des « logiciels libres et gratuits ». Si la gendarmerie Nationale vient de basculer sous Linux, il faut croire que ce n’est pas à jour pour l’Education Nationale ! Aucun reorésentant significatif non plus d’organismes d’Etat développant des produits informatiques !

A croire que l’Education Nationale est d’une telle inculture et incompétence en la matière, alors qu’elle a déjà développé des produits logiciels innovants, opérationnels et ... amortis et qu’avec une réelle volonté politique et des moyens à proportion elle pourrait faire encore mieux et bien davantage... et pour moins cher .

Un des aspects les plus révoltants relatif à la composition de la commission de l’omni président Mounet est qu’elle constitue une insulte à leur travail et à sa qualité qui ont un défaut majeur : être un obstacle à la logique de marché cornaquée par Syntech Medef . De fait elle les réduit déjà à l’inexistence."

article de Patrick Gatines dans Golias Hebdo