Le Ministre et le service minimum
lundi 5 mai 2008
Devant le congrès des associations de parents PEEP, Xavier Darcos a annoncé le 3 mai la relance du service minimum dans les écoles à l’occasion de la grève du 15 mai. Une circulaire serait partie vers les recteurs le 23 avril. La mesure a immédiatement été commentée en termes contradictoires, l’UMP mobilisant ses élus, le maire de Paris annonçant au contraire son intention de ne pas y recourir. Le service minimum (SM) est-il un simple outil de gestion ou une arme politique ?
Le service minimum existe bien en éducation. Il faut d’abord rappeler que les enseignants ne font pas grève contre les parents. Bien au contraire, ils ont besoin de leur soutien et savent parfois le gagner. Pour les enseignants aussi, c’est plus agréable d’aller manifester en sachant ses élèves en sécurité. La mesure (l’ouverture de l’établissement) existe d’ailleurs dans le secondaire sans difficultés. Son introduction au primaire supposerait juste un consensus sur le métier de directeur. Est-il introuvable ? Le ministre avait annoncé en janvier l’ouverture de discussions avec les syndicats. Selon eux, il ne les a jamais organisées. La mesure semble donc à portée de la main. Il faut beaucoup de maladresse ou d’enfermement idéologique pour en avoir fait un terrain d’affrontement.
Car cette mesure est récusée par les premiers intéressés, les communes.
Celles-ci récusent le système proposé par Darcos qui consiste à indemniser les villes pour qu’elles mettent en place le service minimum. En janvier dernier, l’Association des maires de France avait brocardé une mesure qui manifeste « une conception originale du service minimum par report de la responsabilité de l’Etat sur des acteurs étrangers aux conflits ayant conduit à la grève ». L’Andev, qui regroupe les responsables éducatifs des grandes villes, estimait le projet « tout à fait regrettable ». Pour Claudine Paillard, présidente de l’Andev, « en mettant à la charge des communes le service minimum, le MEN évite ainsi une difficile discussion avec les organisations syndicales d’enseignants, qu’il reporte ainsi sur les communes ». L’Andev critique aussi la conception qu’a l’Etat du rôle éducatif des collectivités locales. « En mandatant les communes pour le faire à sa place, elle renvoie une fois de plus les communes à un rôle éducatif limité, essentiellement lié à la fonction de garderie, de service à la famille ». Sur 22 492 communes possédant au moins une école, seulement 1750 avaient signé, en janvier dernier, une convention avec le ministère pour bénéficier du SM. Les résultats des dernières municipales donnent à penser que ce chiffre risque peu de varier positivement.
Sans efficacité réelle pour les familles, elle provoque les enseignants.
Les syndicats enseignants ont dénoncé à juste titre le système de financement annoncé par le ministre. Le service minimum serait financé grâce aux retenues sur salaire sur les grévistes. Ces sommes seraient versées aux municipalités pour payer les intervenants. Ce procédé n’a pas grand sens aux yeux de la comptabilité publique. Par contre, médiatiquement, il laisse entendre qu’on « taxe » les profs, comme s’ils devaient payer pour une faute. Présentée ainsi la mesure vise évidemment à opposer les deux catégories d’acteurs de l’Ecole : parents et enseignants. En ce sens, la mesure illustre la radicalisation de Xavier Darcos.
Nourrit-elle la grève ? Car le service minimum nécessite le dialogue. En annonçant unilatéralement sa décision sans avoir jamais cherché à négocier ce point avec les syndicats, à nouveau Xavier Darcos manifeste qu’il récuse le compromis. C’est justement ce qui justifie la grève du 15 mai.
Source Café Pédagogique