Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans : le SUNDEP a déjà appelé à signer la pétition, si vous ne l’avez pas fait, c’est encore possible !

dimanche 18 juin 2006


« Cette tentative de définition de la personnalité des enfants dès leur plus jeune âge constitue un véritable enfermement ; ils seront définitivement catalogués, devenus des objets décrits par le premier psy qu’ils auront eu la malchance de rencontrer… On retrouve dans cette recherche la tentative de voir en chacun des humains le simple aboutissement des informations qu’il a reçues lors de sa conception. Cette hypothèse du tout génétique est à l’opposé du regard des généticiens qui sont conscients de la pauvreté de cette dotation initiale ». Personne mieux qu’Albert Jacquard ne pouvait l’affirmer dans sa préface à l’ouvrage du collectif .

On sait que ce collectif s’est constitué en réaction à un rapport de l’Inserm qui définissait une nouvelle maladie,« le trouble de comportement » et demandait la détection et la surveillance des enfants dès l’âge de trois ans. La pétition lancée par le collectif frôle les 200 000 signatures et reste d’actualité : le projet de loi sur la délinquance juvénile pourrait en reprendre plusieurs points.

L’ouvrage réunit les contributions de spécialistes hostiles au rapport : pédopsychiatres, pédiatres, psychologues, sociologues, spécialistes de la prévention ou de l’éducation. Ils démontent le texte et mettent à nu l’idéologie qui le sous-tend. Ainsi, Pierre Suesser, pédiatre, rappelle que « inciter à dépister »la froideur affective, la tendance à la manipulation, le cynisme, l’index de moralité affective bas« renvoie à des notions sujettes à caution et inadéquates chez de jeunes enfants. Préconiser d’inscrire à 3 ans dans le carnet de santé »n’a pas de remords, ne change pas sa conduite« conduit à situer les professionnels dans un registre normatif et moral et non plus médical ».

Le sociologue Laurent Muchielli porte la contradiction sur la notion même de délinquance. Il explique que des études portant sur des jeunes de Grenoble et Saint-Etienne ont montré que 76% d’entre eux avaient fraudé dans les transports dans les 2 années précédentes, 32% acheté un objet volé, 24% volé dans un grand magasin, 18% dégradé un espace vert. Alors tous malades à surveiller ?

Philippe Meirieu rappelle la « méthode d’observation systématique des enfants » mise au point par Albert Huth, conseiller du gouvernement allemand de 1928 à 1945. Lui aussi appelait à distinguer des catégories physico-morales chez les enfants « pour mieux les éduquer ». Il partait du principe selon lequel « il n’est pas possible de faire faire à n’importe quel enfant n’importe quoi ». Pour P. Meirieu, « voilà justement l’argument d’autorité implicite dans tous ces travaux et qui les oriente toujours : l’éducation n’est pas un élément significatif dans le développement de l’homme et, en dernier ressort, celle-ci se résume à une opération de tri qui, par ailleurs, permet d’optimiser le fonctionnement économique et social ».

Le combat contre le rapport de l’Inserm est d’abord celui des enseignants, du moins de ceux qui posent le préalable de l’éducabilité.

Le collectif « Pas de zéro de conduite », Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans !,Paris, érès, 2006, 240 pages.

Source café pédagogique

http://www.pasde0deconduite.ras.eu.org/index.php